A part ça… La Ligue d’Impro 

A part ça… La Ligue d’Impro 

On savait que Jacqueline Galant était une grande gestionnaire. Et c’est normal : elle sait très bien s’entourer…

Après les exploits de Clarinval, Dolimont, Glatigny et quelques autres, je me demandais si nos « ingénieurs » du MR et des Engagés étaient formés à utiliser des chiffres tordus et à propager des vérités « alternatives » en libre-service. Ou alors si Tata Jacqueline les avait contaminés. Je dis ça rapport à notre ministre des Médias qui veut « réformer » les médias de proximité (ex-télés locales) de la Fédération Wallonie-Bruxelles. Qui sont douze aujourd’hui. Un à Bruxelles : BX1. Et onze répartis sur la Wallonie : Notélé, TéléMB, Antenne Centre, Télésambre, Boukè, Canal Zoom, Matélé, TVcom, Quatre, Vedia et TéléLux. La Grande Jaja veut les réduire à huit. Pour « participer à l’effort ».

Et pour bien relayer ses « arguments », Tata Jacqueline peut compter sur deux députés du Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles : Olivier Maroy (MR) et Armelle Gysen (Les Engagés). Deux « experts » issus du sérail RTBF, et ayant bénéficié comme il se doit des chipotages « télépotiques » de leur parti pour devenir députés wallons/FWB. Et c’est beau de voir comment ces deux Télétubbies de la politique wallonne sont en phase avec leur ministre chérie. Je veux dire qu’ils tripotent les chiffres aussi bien qu’elle. Ils t’assènent des « réalités » aussi lourdement qu’elle. Et comme leur inspiratrice, les deux « assistants » ne pensaient pas que des vilains allaient « fact-checker » leurs belles histoires. Ce que les équipes d’Antenne Centre et de Notélé viennent de faire.

Pour justifier l’impérieuse nécessité de réformer les télés locales, Olivier Maroy martèle que, tatatam !, « plus de la moitié des médias de proximité sont en faillite virtuelle ». Avant de développer cet argument badaboum, tu te dis que le gars est allé consulter le site de la Banque nationale, où les bilans comptables sont dispos. Ah ben non, on dirait. Aucun média de proximité n’est en faillite. Ni réelle, ni virtuelle. Peut-être qu’Oli a confondu avec des investissements qui pèsent sur les résultats 2024 de deux médias sur les douze : Boukè et Télésambre. Ce qui n’a rien à voir avec une faillite. Y savait pas.

Après, deuxième argument maousse de celui qui fut journaliste, il y a longtemps : « Ne rien faire pour ne pas déplaire à quelques baronnies locales, c’est à terme voir disparaître une grande partie des médias de proximité. » Est-ce assez dire donc que le gaillard sous-entend que ces médias seraient à la solde de quelques élus locaux ? Là, Oli, il faudrait pitête consulter la composition de leurs conseils d’administration. Tu verras que la moitié de ces CA est composée des forces politiques de la zone que couvrent ces télés locales (une obligation), l’autre moitié regroupant les forces vives de la région (associatif, économique, culturel). Et t’sais quoi ? C’est ta ministre qui, dans sa réforme, veut éjecter le secteur associatif et culturel de ces CA pour les remplacer par des bourgmestres et des échevins locaux. Donc les repolitiser. Y savait pas non plus.

Un autre petit fake qui dénoncerait une gabegie ?À ton tour Armelle, fais-toi plaisir : « Il existe actuellement onze médias de proximité en Wallonie, avec onze conseils d’administration et autant de services destinés aux ressources humaines, à la comptabilité ou à ce qui relève du juridique. » Comme Tante Jacqueline, Fifille n’a pas dû beaucoup visiter ces médias de proximité : il n’y existe aucun service de ce type avec plusieurs personnes. Dans certaines télés locales, la comptabilité, les RH et le juridique sont assumés par… la même personne. Mieux : certains moyens administratifs ou juridiques, sont déjà mutualisés via le réseau des médias de proximité. Donc plouf.

Oui mais, rétorque-t-elle, il y a ça : « Les audiences plongent ! » Et aussi ça, ajoute Maroy : « Les grandes plateformes cannibalisent les audiences ! Le modèle est à bout de souffle ! » Ah bon ? Selon la dernière enquête d’audience (2023), 600.000 personnes regardent les médias de proximité chaque jour, alors que le nombre de spectateurs réguliers est en augmentation constante depuis 2019. Et nos deux « sachants » sachent-ils que les médias de proximité sont depuis belle lurette sur les réseaux sociaux, et pas que sur leur antenne « linéaire » ? Qu’ils y développent des contenus adaptés à ces réseaux ? Et que, exemple, Antenne Centre y cumule 100.000 followers avec des pointes à plusieurs millions de vues lors du Carnaval de Binche en 2025 ? Et que, selon une enquête du Crisp en 2024, 7 Belges sur 10 se disent très intéressés par l’information locale ? Ce qui est « à bout de souffle », c’est la vision éculée que nos deux « experts » ont des médias de proximité, qui se consomment de plus en plus via le net. Une mise à jour à prévoir, peut-être ?

Une dernière du député MR : « La réforme n’impactera pas la couverture médiatique des régions concernées ni le pluralisme des médias. » Mais très certainement que non, Oli ! Avec quatre télés locales wallonnes de moins (sur 11 !) en 2031, moins de budget dès 2026, moins de personnel, moins de présence, pour sûr que ce sera tout aussi bien question couverture. D’ailleurs pourquoi sont-ils si mwés à la Fédération européenne des journalistes ? La FEJ affirme que le pluralisme des médias est déjà désastreux chez nous, avec notamment la concentration de la presse écrite dans un seul groupe (absorption d’IPM par Rossel). La FEJ pointe déjà des « déserts informationnels » dans certaines régions de Wallonie. Et conclut que la « réforme » des médias publics de proximité « ne peut qu’aggraver la situation ». Et tiens, pourquoi donc le Conseil supérieur de l’audiovisuel vient-il de rendre un avis de grosse buse sur votre réforme ? Notamment sur la nouvelle répartition géographique « par province » des médias locaux, qui pour le CSA est « inadaptée à la mission de proximité », alors que les « bassins de vie » actuels le sont, eux, parce qu’ils sont « plus fidèles aux réalités locales et aux logiques socioculturelles des territoires ». Attention Jaja, Oli et Armelle ! Personne ne dit qu’il n’y a rien à améliorer. Ou que les médias locaux ne doivent en rien participer aux économies en FWB. Mais disons que ce serait pas mal de « réformer » sur base de réalités, de données, de chiffres objectifs, et pas sur un carton de bière avec des trucs-brolls fantasmés. Or là, à ce jour, rien n’est sérieusement chiffré. Aucune étude préalable sur l’impact de votre réforme n’a été faite. Et encore moins une vision globale sur les missions que doivent remplir l’ensemble des médias publics : que doit faire la RTBF et que doivent assumer les chaînes de proximité ? Donc c’est comme d’hab : la Ligue d’improvisation. Il ne manque plus qu’un « consultant » extérieur pour encore mieux vous aider à imposer votre affaire. Je propose Christophe Deborsu.

Vincent Peiffer
Chroniqueur MaTribune.be |  Plus de publications

Après 40 ans au Moustique, Vincent rejoint l’équipe de MaTribune.be pour mettre son grain de sel dans notre si beau monde. Où, à part ça, tout va bien…

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